Résumé
Lancé en juin 2023, ce
projet de recherche est exécuté afin d’éclairer les universitaires, les décideurs,
les législateurs et les organisations non-gouvernementale qui ont leurs
missions dans le secteur de l’ESU (enseignement supérieure et universitaire)
sur les exclusions multiformes perpétrées dans le milieu académique. Il
interroge les acteurs sur le déroulement des phénomènes (les causes profondes
et les conséquences), travail avec eux pour le rétablissement de la cohésion
sociale, le vivre ensemble et l’inclusion des personnes issus des catégories
marginalisées ou sous-représentées.
Dans sa particularité, cet article, présente la synthèse du rapport de juillet 2023, qui aborde l’angle de la laïcité face aux exclusions dans le milieu académique dues à l’appartenance religieuse. Ainsi nous avons analysé l’origine ethnico-tribale de l’église/confession religieuse, les liens tribaux dans le fonctionnement de ses structures économiques, notamment les universités t instituts supérieurs, et exclusions sur des soubassements tribalo-ethnico-claniques qui s’y perpétues. Pour y arriver, 6 universités, 3 au Nord-Kivu et 3 au Sud-Kivu ont été pris comme échantillons pour une représentation de 1050 enquêtés.
Mots-clés
Cohésion
sociale, l’inclusion sociale, exclusion, vivre-ensemble, université, étudiant,
universitaire, religions/confession religieuse, ethnico-tribale, enseignement
supérieur et universitaire, laïcité.
Introduction
Avant les années 2000, en République démocratique du Congo,
pour poursuivre les études supérieures et universitaires, les jeunes du Nord et
Sud-Kivu se rendaient soit à Kinshasa, Lubumbashi et la majorité à Kisangani
qui semblait être proche de ces deux provinces. Dans ces villes, les
universitaires fondèrent les groupes de ressortissants de telle ou telle
province, dans l’objectif d’une assistance mutuelle. À cette époque, les
groupes ethniques, religieux et politiques au sein des universités et instituts
supérieurs n’avaient pas un grand effet sur les quotidiens dans la vie
académique. Le milieu académique de nos jours s’est vu envahi par
plusieurs phénomènes qui nuisent à la formation de l’homme capable de guider la
communauté vers le vivre-ensemble.
Les questions sur l’université congolaise ont suscité la
curiosité de quelques chercheurs il y a de cela quelques années. Plusieurs
projets de réformes ont été amorcés, plusieurs lois ont été
promulguées. Par contre, ces derniers sont loin de montrer leurs
efficacités dans la sphère universitaire congolaise. De nos jours,
l’imaginaire universitaire congolais se fonde dans l’optique de l’offre et de
la demande afin de donner aux marchés une main d’œuvre efficace. Pourtant,
en amont, l’université doit être réfléchie en axant la formation sur l’éthique
et la citoyenneté solide, pour donner au marché et à l’emploi une dimension
humaine profonde [Professeur Kamana, 2020].
Dans la vie courante, la rivalité sur base des
croyances se manifeste dans les consciences des dirigeants, des leaders et de
la population lambda. Le modèle universitaire congolais étant
aussi celui nous légué par la métropole belge, il est aussi
celui fondé sur une base religieuse. Allons-y réfléchir tout en constatant
la multiplication des églises et sectes, dans un contexte où les religions
veulent se positionner économiquement et idéologiquement. Comment la
laïcité est aujourd’hui confrontée aux prises des positions de tout un chacun
dans les instituts supérieurs et universitaires. De l’origine des religions/confessions
religieuses qui investissent dans le secteur de l’ESU, quel degré d’influence
ont ces religion/confessions religieuses sur le fonctionnement des
institutions universitaires ? Quand est-il du choix des
étudiants pour les institutions d’apprentissages ? Entre adeptes et non
adeptes, comment se débobinent les libertés d’opinion et de croyances ?
Cette
recherche s’est déroulée dans le Nord et Sud-Kivu, du 1er juillet au 30 juillet
2023. Elle a apprêté une méthode mixte (qualitative et
quantitative). Du point qualitatif, pour étudier les phénomènes
particuliers : « les liens tribaux dans le fonctionnement de
l’église/confession religieuse et le fonctionnement de ses structures
économiques», nous avons utilisé l’analyse conjoncturelle. C’est-à-dire,
étudier les phénomènes historiques dans l’apparition de la religion/confession
religieuse jusqu’ à son investissement dans l’éducation et dans l’économie. Cela
allant de l’esclavagisme depuis 1506, du colonialisme depuis 1885, en passant
par 1921 à 1922, où les sociétés des missionnaires entrent en pompe en RDC en
passant par le Kivu jusqu’à nos jours.
La
démarche quantitative nous a conduites à l’enquête sociale, pour un
échantillonnage représentatif. L’étude s’est focalisée sur 6 universités
qui émanent de la religion/confession religieuse (trois au Nord-Kivu et
trois au Sud-Kivu). Au Nord-Kivu : UAGO (université Adventiste de
Goma) représentée par 149 enquêtés, ULPGL/Goma (université libre
des pays de grand lac) représentée par 188 enquêtés,
et UCS (Université Catholique la Sapientia) représentée
par 146 enquêtés. Au Sud-Kivu : UCB (Université Catholique
de Bukavu) représentée par 199
enquêtés, ULPGL/Bukavu (université libre des pays de grand
lac) représentée par 183 enquêtés
et UEA (Université Evangélique en Afrique) représentée
par 185 enquêtés. Au total, 1050 personnes ont été enquêtées. Dont la
représentativité féminine de 38 pourcent et celle masculine de
62 pourcent.
Des études sociologiques ont démontré l’apport positif de
l’appartenance religieuse pour le rendement scolaire, la vie de famille, le
bien-être et la contribution à la vie communautaire. Il est important d’évaluer
son apport dans la partie Est de la République démocratique du Congo. De
l’avènement de la colonisation en République démocratique du Congo, l’un
des piliers du système colonial belge fut l’église/confession religieuse.
Plus tôt, la mission d’évangélisation des missionnaires Jésuite dans le
Royaume Kongo aujourd’hui Congo-Kinshasa et Angola en 1548,
tel qu'interrompu en 1762, et puis rouvert en 1893 avec
l’Etat indépendant du Congo, sous le règne de Nzinga Mbemba, avec
l’influence des premiers jésuites, le Congo avait adopté le christianisme comme
religion officielle. L’Islam est arrivé en RDC, en passant par la
province du Maniema en 1860 [Archive sur l’islam
au Maniema par Réveil-FM]. De 1921
à 1922, Les sociétés des missionnaires entrent en pompe
en RDC en passant par le Kivu. [Faustin-Noël. G, 2018] Les pentecôtistes Suédois, les
pentecôtistes Norvégiens et l’union de pentecôtistes des
missionnaires de Grande Bretagne se concentrent dans le Kivu, d’où
naissent plusieurs églises et spécifiquement le CBCA qui fut l’ouvre
du missionnaire Américain Paul Hurlburt en 1927 dans le territoire
de Lubero à Kitsombiro [Isaac Kasereka 2014]. De l’Est à l’Ouest, le pays a connu l’avènement de la communauté E.R.C. (Eglise de
Réveille au Congo) en 1997[M.
Gomez-Perez et M. Nathalie, 2012] qui compte aujourd’hui plus de 6 900 églises membres [Fatimata Burki, 2015]. Ainsi,
par cette influence, la religion et le culte restent fortement ancrés chez la plupart
des individus de sorte qu’il influence fortement la vie sociale et la vie
politique du pays. Des origines lointaines (tribales et ethniques),
la religion/confession religieuse sont devenues un élément fondamental de
l’identité humaine. Pour de nombreux adeptes, elle est beaucoup plus qu’un
choix de mode de vie, elle est leur essence propre.
C’est ainsi, les origines des églises/confessions religieuses
sont devenues les nœuds même de la division des membres de la
société. Lors des conflits (crise de leadership, conflits d’intérêt,
etc.) dans les églises, il est constaté l’exploitation des différences
entre les origines, tribus, ethnies et familles des adeptes pour monter les uns
contre les autres. De tels actes qui finissent de semer les divisions et les
exclusions au sein des églises/confessions religieuses. Dans la plupart
des cas, la multiplication des églises/confessions religieuses, trouve sa
justification dans la motivation d’un leader (pasteur) de créer une
cité de refuge spirituel pour les membres de sa communauté. Bref, un cadre
où vont se sentir acceptés ses proches et célébrer leurs identités.
En 1954, le Congo Belge actuel République démocratique du
Congo se dote de sa première université sous l’initiative des pères
jésuites. Dans moins de deux ans, sous l’initiative d’ULB (université libre de Liège) à Lubumbashi, précisément en
1955, la deuxième université naquit. En 1963, à l’initiative des
missionnaires protestants, Kisangani abritait la troisième université du pays [Prof. Dr. Mudogo Virima]. Et donc,
l’influence de la religion sur le secteur de l’ESU est
lointaine. Certes, les tentatives de diminuer son influence ont existé,
mais sans un succès pérenne.
Le facteur identitaire de l’église/
confession religieuse jadis conçue et consolidée par la famille, par la
tribu et par l’ethnie oriente le choix des institutions académiques des
étudiants. Cette motivation se représente comme un refuge (un espace
où ils doivent trouver les leurs et se faire accepter dans ses forces et
faiblisse) pour un grand nombre d’étudiants. Elle s’échafaude comme
une construction représentative de soi dans son rapport à l’autre et à la
société. Ainsi, entre l’affinité (l’influence des membres de
l’église/ confession religieuse, de la famille, de la tribu, de l’ethnie,
etc.), la faculté ou l’option qu’organisent une institution académique et les
valeurs que prône une institution académique. Sur le 100% enquêtés, 41 % des
étudiants, l’affinité a influencé leurs choix. Les pertinences des
facultés et options qu’organisent les universités ont motivé les
choix des 40 % des étudiants et 17 % des étudiants leurs choix sont motivés par
les valeurs que prônent les universités.
Une société qui prétend être libre doit militer pour une
grande diversité de croyances, de goûts, de visées, de coutumes et de normes de
conduite. Une société qui se veut libre vise à assurer à tous, l’égalité
quant à la jouissance des libertés fondamentales. Paradoxalement, en RDC, les religions/confession religieuse se
définissent par ses origines lointaines au pays. Comme les exclusions
politico-régionalistes, les exclusions ethnico-tribales ont fait débat au point d’intéresser
plusieurs penseurs et écrivains congolais, les exclusions religieuses musellent la liberté,
freinent l’accès à l’emploi et à des différentes opportunités dans les
institutions académiques conventionnelles.
À la question de savoir si les étudiants se sentaient à
l’aise à exprimer leurs convictions et leurs opinions basées sur la
culture, la religion, idéologie, etc. 29 % affirment être à l’aise
d’exprimer leurs convictions au sein de l’université, contre 71 % qui déclarent
être inquiets d’exprimer et d'affirmer leurs convictions au risque d’être réprimés.
Nous nous retrouvons dans un environnement où certaines
populations se définissent par l’appartenance à telle ou telle religion de sa
région d’origine. L’appartenance religieuse est communautaire, familiale
et héréditaire. Trahir une religion de ses parents risquerait de coûter
une exclusion familiale. Par y cocher, sur le terrain du marché
d’emploi qui est devenu ethnico-tribal depuis un bon moment, le clientélisme religieux est un nouveau
facteur qui se consolide à petit pas, et est devenu une source des
‘’tensions, ou des violences’’.
Conclusion
Tout autour de nous s’étalent, de par le monde, les tragiques
conséquences de notre incapacité ou de notre refus de vivre en paix avec les
autres. La libre association est devenue un outil que se servent les antagonistes
pour se venger contre l’injustice subit. De nos jours, les églises et
confessions religieuses naissent comme des champignons. Partant de ceux
qui s’y vivent, elles sont très loin d’être le catalyseur de la cohésion
sociale. Les conflits issus de la religion/confession religieuse ont
affecté l’université.
Bien entendu, les traditions et les lois sont faites pour
évoluer. Notre laïcité universitaire mérite d’être réfléchie, pensée et
évoluer afin de devenir un facteur clé de la cohésion sociale à la lumière des
conditions présentes, d’autant puisqu’elle s’est construite « en creux
». Le choix qui a été fait sous la 2e république (remettre
l’éducation dans les mains de l’Etat) était sans aucun doute une décision
courageuse sur le point de détacher les traditions religieuses des grandes
disciplines des sciences humaines et sociales et de l’approche universitaire
critique. Dans un contexte où le gouvernement doit réguler le secteur
éducatif et celui de l’ESU en particulier, la laïcité et l’universalité
s’émissent comme principe de l’harmonisation de la vie académique, de la
gestion des institutions universitaires et l’un des piliers sur lequel
l’université doit travailler pour changer le mode de vie et l’interaction entre
les universitaires et les membres de la société en général.
Il y a opportunité que l’université congolaise bénéficie de
l’opportunité de la multi-religieuse comme appartenance de ses membres,
d’autant plus que la religion fait la patrie de l’ « art de
l’association » nécessaire au fonctionnement de la démocratie libérale. Il y a
opportunité que l’université congolaise bénéficie de l’opportunité de la
multi-religieuse comme appartenance de ses membres, d’autant plus que la
religion fait la patrie de l’ « art de l’association » nécessaire au
fonctionnement de la démocratie libérale.